
Ci-dessus, logo de l’Etat du Vatican.

Au cours de son voyage apostolique en Hongrie le Pape François s’est exprimé sur plusieurs sujets majeurs, en particulier sur la guerre en Ukraine. Ses propos, singulièrement politiques, et en contradiction manifeste avec l’esprit belligène dominant, méritent d’être relevés et salués. Le Pape a confirmé, non sans humour, qu’une initiative du Vatican est déjà en cours… ce qui est une bonne nouvelle à mettre en évidence, tandis que les médias et bien des responsables politiques font silence sur cette intervention ou médiation positive à venir. Le Pape François s’est engagé à en parler ultérieurement.
Le Pape François s’est exprimé sur d’autres sujets importants comme l’Europe ou les migrants, mais aussi sur des questions sociétales : la famille, le genre, l’avortement… L’auteur de ces lignes tient à souligner qu’il n’appouve pas toutes les déclaratios faites par le Pape François.

Voici les propos tenus par le Pape François lors d’une conférence de presse pendant le vol du retour (1) :
Dimanche 30 avril 2023
Eliana Ruggiero – AGI (Agence de presse italienne)
Saint-Père, vous avez lancé un appel à ouvrir – à rouvrir – les portes de notre égoïsme aux pauvres, aux migrants, à ceux qui ne sont pas en règle. Lors de votre rencontre avec le Premier ministre hongrois Orbán, lui avez-vous demandé de rouvrir les frontières de la route des Balkans qu’il a fermées ? Puis, ces derniers jours, vous avez également rencontré le métropolite Hilarion : Hilarion, et Orbán lui-même peuvent-ils devenir des canaux d’ouverture vers Moscou pour accélérer un processus de paix pour l’Ukraine, ou rendre possible une rencontre entre vous et le président Poutine ? Je vous remercie.
Pape François :
Je crois que la paix se fait toujours par l’ouverture de canaux, jamais par la fermeture. J’invite tout le monde à ouvrir des relations, des canaux d’amitié. Ce n’est pas facile. Le même discours que j’ai tenu en général, je l’ai tenu avec Orbán et je l’ai tenu partout.
(…)
Sur l’immigration : je pense que c’est un problème que l’Europe doit prendre en main, parce qu’il y a cinq pays qui souffrent le plus : Chypre, la Grèce, Malte, l’Italie, l’Espagne, parce que ce sont les pays méditerranéens et que la majorité y débarque. Et si l’Europe ne s’occupe pas de cela, d’une répartition équitable des migrants, le problème ne concernera que ces pays. Je pense que l’Europe doit faire en sorte que les gens sentent qu’elle est l' »Union européenne », même face à cela.
(…)
Et puis, pour finir, Hilarion. Hilarion est quelqu’un que je respecte beaucoup et nous avons toujours eu de bonnes relations. Il a eu la gentillesse de venir me voir, puis il est allé à la messe, et je l’ai aussi vu ici, à l’aéroport. Hilarion est une personne intelligente avec laquelle on peut parler, et ces relations doivent être maintenues, parce que si nous parlons d’œcuménisme et que nous disons ensuite « j’aime ceci, je n’aime pas cela »… Nous devons tendre la main à tout le monde, et aussi recevoir la main des autres. Je n’ai parlé qu’une seule fois avec le patriarche Kirill depuis le début de la guerre, 40 minutes pour zoomer, puis par l’intermédiaire d’Antony, qui remplace Hilarion et qui vient me voir : c’est un évêque qui a été pasteur à Rome et qui connaît bien l’environnement, et c’est toujours par son intermédiaire que je suis en contact avec Kirill. La rencontre que nous devions avoir à Jérusalem en juillet ou juin de l’année dernière est en suspens, mais elle a été suspendue à cause de la guerre : il faudra la faire. Et puis, avec les Russes, j’ai de bonnes relations avec l’ambassadeur qui part maintenant, ambassadeur pendant sept ans au Vatican, c’est un grand homme, un homme comme il faut. C’est une personne sérieuse, cultivée, très équilibrée. Les relations avec les Russes sont principalement le fait de cet ambassadeur. Je ne sais pas si j’ai tout dit…
Eliana Ruggiero :
S’ils pouvaient d’une manière ou d’une autre, Hilarion et Orbán, accélérer le processus de paix en Ukraine et rendre possible une rencontre entre vous et Poutine, s’ils pouvaient agir – entre guillemets – en tant qu’intermédiaires ?
Pape François :
Vous pouvez imaginer que lors de cette réunion, nous n’avons pas seulement parlé du Petit Chaperon Rouge. Nous avons parlé de toutes ces choses-là. Nous en avons parlé parce que tout le monde est intéressé par le chemin de la paix. Je suis prêt. Je suis prêt à faire tout ce qui doit être fait. Une mission est déjà en cours, mais elle n’est pas encore publique, voyons…. lorsqu’elle sera rendue publique, j’en parlerai.
Note : le métropolite Hilarion est le chef du département des relations extérieures du Patriarcat de Moscou dont le Primat est le Patriarche Kirill.
1) Voyage apostolique de sa Sainteté François en Hongrie (28 – 30 avril 2023). Conférence de presse du Saint Père pendant le vol du retour. Vol papal Dimanche 30 avril 2023 https://www.vatican.va/content/francesco/fr/events/event.dir.html/content/vaticanevents/fr/2023/4/30/ungheria-voloritorno.html

Extraits du discours du Pape François sur la guerre en Ukraine et sur la paix, lors de sa rencontre avec les autorités, la société civile et le corps diplomatique à Budapest (1)
Vendredi 28 avril 2023
Après la guerre, l’Europe a été, avec les Nations-Unies, le grand espoir dans l’objectif commun que des liens plus étroits entre les nations empêcheraient de nouveaux conflits. Malheureusement, cela n’a pas été le cas. Cependant, dans le monde où nous vivons, la passion pour la politique communautaire et le multilatéralisme semble être un beau souvenir du passé : on semble assister au triste déclin du rêve choral de paix, tandis que les solistes de la guerre prennent la place. D’une manière générale, l’enthousiasme pour la construction d’une communauté des nations pacifique et stable semble s’être désintégré dans les esprits, tandis que l’on marque les zones, que l’on marque les différences, que les nationalismes recommencent à gronder et que l’on exacerbe les jugements et les tons à l’égard des autres. Au niveau international, il semble même que la politique ait pour effet d’enflammer les esprits plutôt que de résoudre les problèmes. Elle oublie la maturité acquise des horreurs de la guerre et régresse vers une sorte d’infantilisme belliqueux. Mais la paix ne viendra jamais de la poursuite d’intérêts stratégiques particuliers, mais plutôt de politiques capables de considérer l’ensemble, le développement de tous : attentives aux personnes, aux pauvres et à l’avenir, et pas seulement au pouvoir, aux gains et aux opportunités du moment.
(…)
C’est un sujet, celui de l’accueil, qui suscite beaucoup de débats à notre époque et qui est certainement complexe. Cependant, pour ceux qui sont chrétiens, l’attitude de base ne peut pas être différente de celle que saint Étienne a transmise, après l’avoir apprise de Jésus qui s’est identifié à l’étranger à accueillir (cf. Mt 25, 35). C’est en pensant au Christ présent en tant de frères et sœurs désespérés qui fuient les conflits, la pauvreté et le changement climatique, qu’il faut aborder le problème sans excuses ni retards. C’est un thème qui doit être abordé ensemble, communautairement, aussi parce que, dans le contexte où nous vivons, les conséquences affecteront tôt ou tard tout le monde. C’est pourquoi il est urgent, en tant qu’Europe, de travailler à des voies sûres et légales, à des mécanismes partagés face à un défi historique qui ne pourra être maîtrisé par le rejet, mais qui doit être accueilli pour préparer un avenir qui, s’il n’est pas ensemble, ne sera pas. Cela appelle en première ligne ceux qui suivent Jésus et veulent suivre l’exemple des témoins de l’Évangile
1) Voyage apostolique en Hongrie : Rencontre avec les autorités, la société civile et le corps diplomatique. Ancien couvent des Carmélites (Budapest).