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Genève, 11 avril 2025 Ravina Shamdasani, porte-parole du Haut-Commissariat des Nations Unies aux droits de l’homme – https://www.ohchr.org/fr/press-briefing-notes/2025/04/gaza-increasing-israeli-evacuation-orders-lead-forcible-transfer

La multiplication des « ordres d’évacuation » par les forces israéliennes, qui sont en réalité des ordres de déplacement, a entraîné le transfert forcé de Palestiniens de Gaza vers des zones de plus en plus restreintes où ils ont un accès limité, voire inexistant aux services vitaux, dont l’eau, la nourriture et un abri, et où ils continuent d’être victimes d’attaques.

Depuis le 18 mars, Israël a annoncé 21 « ordres d’évacuation ». Le 31 mars, l’armée israélienne a publié un ordre couvrant la quasi-totalité de Rafah, la province la plus méridionale, suivi d’une opération terrestre à grande échelle dans la région. Des dizaines de milliers de Palestiniens seraient déjà pris au piège à Rafah, notamment dans la région de Tal Al Sultan, sans possibilité de sortie ni d’accès à l’aide humanitaire.

Si Israël, en tant que puissance occupante, peut légalement ordonner l’évacuation temporaire de civils dans certaines zones sous des conditions strictes, la nature et la portée des ordres d’évacuation suscitent de graves préoccupations quant à l’intention d’Israël de déplacer définitivement la population civile de ces zones afin de créer une « zone tampon ». Le déplacement permanent de la population civile à l’intérieur d’un territoire occupé équivaut à un transfert forcé, ce qui constitue une violation grave de la quatrième Convention de Genève et un crime contre l’humanité en vertu du Statut de Rome.

Pendant ce temps, les frappes militaires israéliennes se poursuivent dans toute la bande de Gaza, ne laissant aucun endroit sûr. Entre le 18 mars et le 9 avril 2025, quelque 224 incidents ont été recensés, au cours desquels Israël a lancé des frappes contre des bâtiments résidentiels et des tentes destinés aux personnes déplacées à l’intérieur du pays. D’après les informations corroborées par le Haut-Commissariat des Nations Unies aux droits de l’homme (HCDH), les victimes recensées à la suite de 36 frappes étaient toutes des femmes et des enfants. Selon les données enregistrées par le HCDH, les victimes sont dans l’ensemble en grande partie des enfants et des femmes. Une frappe récente sur la résidence de la famille Abu Issa à Deir al-Balah, le 6 avril, aurait tué quatre femmes, une fille et un garçon de 4 ans. Et malgré les ordres militaires israéliens enjoignant aux civils de se déplacer vers la zone d’Al-Mawasi, à Khan Younès, les frappes se sont poursuivies sur les tentes de personnes déplacées dans cette zone, au moins 23 incidents de ce type ayant été enregistrés par le HCDH depuis le 18 mars.

À cette tendance alarmante s’ajoute le fait que des journalistes palestiniens sont pris pour cible et assassinés. Dans la nuit du 6 au 7 avril, une frappe aérienne israélienne a touché une tente devant le complexe médical Nasr à Khan Younès, où plusieurs journalistes étaient censés se trouver. L’attaque aurait été perpétrée sans avertissement, tuant un journaliste et un assistant d’une agence de presse, et blessant neuf autres journalistes, dont un qui a succombé à ses blessures par la suite. L’armée israélienne a ensuite affirmé que l’un des blessés était un membre du Hamas, mais on ignore toujours si cet individu avait ou non été identifié et pris pour cible en tant que membre de la branche armée du Hamas. Depuis octobre 2023, plus de 209 journalistes ont été tués à Gaza, tandis qu’Israël continue de refuser l’accès aux médias internationaux.

Ces attaques, comme d’autres, soulèvent de graves questions quant au respect par les forces israéliennes du droit international humanitaire, en particulier des principes de distinction, de proportionnalité et de précaution dans l’attaque. Le fait de diriger intentionnellement des attaques contre des civils qui ne participent pas directement aux hostilités constitue un crime de guerre.

Pour aggraver encore la situation désespérée des civils palestiniens, Israël maintient depuis maintenant six semaines la fermeture des points de passage vers la bande de Gaza, empêchant l’entrée de denrées alimentaires, d’eau potable, de médicaments et d’autres aides ou fournitures essentielles. Les responsables israéliens ont fait des déclarations suggérant que l’entrée de l’aide humanitaire est directement liée à la libération des otages, ce qui soulève de graves préoccupations quant au recours à des punitions collectives et à la famine de la population civile comme méthode de guerre, deux actes qui constituent des crimes au regard du droit international.

Compte tenu de l’impact cumulé du comportement des forces israéliennes à Gaza, le HCDH est gravement préoccupé par le fait qu’Israël semble imposer aux Palestiniens de Gaza des conditions de vie de plus en plus incompatibles avec leur existence en tant que groupe à Gaza.

Les manifestations des Palestiniens contre le Hamas, dans l’exercice de leurs droits à la liberté de réunion et d’expression garantis par le droit international, ont également été réprimées par la force, et plusieurs personnes ont subi de violentes représailles.

Le désespoir des Palestiniens, soumis à des agressions extérieures et à des pressions internes, est total.

Le Haut-Commissaire des Nations Unies aux droits de l’homme Volker Türk a souligné, notamment devant le Conseil de sécurité des Nations Unies la semaine dernière, que les 18 derniers mois de violence ont montré très clairement qu’il n’existe pas de solution militaire pour sortir de cette crise. Toutes les parties doivent se concentrer entièrement sur la réalisation d’un cessez-le-feu, plutôt que de chercher à justifier la prolongation d’une violence absurde. La seule façon d’avancer est de parvenir à un règlement politique, reposant sur deux États vivant côte à côte et égaux en dignité et en droit, conformément aux résolutions des Nations Unies et au droit international. Les otages doivent tous être libérés immédiatement et sans condition. Toutes les personnes détenues arbitrairement doivent aussi être libérées.


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