Yémen: la France fournit les armes du carnage…

« Mirages 2000, chars Leclerc, canons Caesar: la France fournisseuse officielle du carnage yéménite »

par Anne-Sophie Simpere, 6 février 2018  –  BASTAMAG

Caesar. Site du Ministère des Arméesphoto d’un canon Caesar. Site du Ministère des Armées.

https://www.bastamag.net/Mirages-2000-chars-Leclerc-canons-Caesar-la-France-fournisseuse-officielle-du

« Depuis mars 2015, une coalition d’États arabes emmenés par l’Arabie Saoudite conduit une campagne militaire particulièrement meurtrière au Yémen. Les combats s’enlisent, marqués par de potentiels crimes de guerre et par une catastrophe humanitaire sans précédent. Tandis que plusieurs États ont décidé d’arrêter de fournir des armes aux belligérants, la France, « patrie des droits de l’homme » semble indifférente à la controverse, se réjouit même de ses ventes d’armes « record » et de leurs performances en matière de destruction.

 

Les industriels français de la défense sont fiers des performances de leur matériel. Rien de tel qu’une campagne militaire meurtrière pour en démontrer les qualités ! « Pour ce qui est des chars Leclerc, je vous confirme que leur implication au Yémen a fortement impressionné les militaires de la région », se réjouissait, il y a un an, Stéphane Mayer, PDG du groupe Nexter qui fabrique ces blindés, devant la commission de la Défense de l’Assemblée nationale. Depuis le printemps 2015, 70 à 80 chars Leclerc ont été déployés par l’armée émiratie, alliée de l’Arabie Saoudite, sur le champ de bataille yéménite afin de combattre la rébellion des Houthis.

Même satisfaction chez Dassault, qui fournit des Mirages 2000-9 à cette même armée des Émirats Arabes Unis, et vient de signer un contrat de modernisation de leur flotte : « L’excellence de l’avion et le succès du programme ont été démontrés avec brio par la grande disponibilité du Mirage 2000-9 et la qualité de sa participation à des opérations menées en coalition internationale », annonce fièrement un communiqué du groupe français. Les opérations en question ? Les frappes aériennes de la coalition arabe au Yémen dont certaines, selon l’ONU et des organisations non-gouvernementales, pourraient constituer des crimes de guerre.

« Horreur permanente », selon l’Onu

Quelle est aujourd’hui la situation du Yémen, vitrine de ce savoir-faire français ? Après plus de 30 000 bombardements et un blocus qui entrave l’accès humanitaire, le bilan de cette guerre lointaine est d’au moins 10 000 morts et près de 3 millions de déplacés. L’Unicef estime qu’un enfant y meurt toutes les dix minutes, qu’1,8 million d’entre-eux souffrent de malnutrition aigüe, et que près de 400 000 enfants yéménites sont atteints de malnutrition sévère et luttent pour survivre. Sans parler de l’épidémie de choléra, un désastre dans un pays dont le système de santé est exsangue et où les organisations humanitaires sont elles aussi victimes des bombardements. Plusieurs hôpitaux de Médecins sans frontières (MSF) ont ainsi été visés.

Le Yémen traverse peut-être actuellement « la pire crise humanitaire depuis la fin de la Seconde guerre mondiale », alertent les Nations-unies, dont plusieurs responsables qualifient la guerre d’« absurde et futile », tandis que le haut-commissaire aux droits de l’homme de l’Onu, Zeid Ra’ad Zeid Al-Hussein, parle d’« horreur permanente ». Le 21 décembre 2017, alors que l’un des pays les plus pauvres du monde subit des bombardements depuis mille jours, plusieurs ONG lancent la campagne « Yemen can’t Wait » : le Yémen ne peut pas attendre. Une situation si dramatique que certains pays commencent à trouver gênant de continuer à fournir des armes aux belligérants qui s’acharnent.

Un mouvement de désengagement ignoré par la France

Dès mars 2016, le parlement hollandais vote ainsi une résolution interdisant l’exportation d’armes vers l’Arabie Saoudite, en lien avec son intervention au Yémen. Mi janvier, c’est l’Allemagne, qui a été ces dernières années l’un des gros exportateurs d’armes vers les pays de la coalition qui fait la guerre au Yémen, qui annonce l’arrêt immédiat des ventes d’armes à toutes les parties du conflit. Une décision favorisée par les sociaux-démocrates du SPD, dans le cadre des négociations pour former une nouvelle coalition gouvernementale.

Face au risque que les armes soient utilisées contre des civils, la Norvège, la Belgique et le Canada gèlent également des exportations vers les Émirats Arabes Unis ou vers l’Arabie saoudite. En Finlande, tous les candidats à la présidentielle de février 2018 se sont engagés à arrêter les ventes d’armes aux émiratis, après que des images aient prouvé leur utilisation dans la guerre au Yémen. Quand les gouvernements ne bougent pas, c’est la société civile qui prend le relai : des plaintes sont en cours au Royaume-Uni, en Wallonie et au Canada contre des contrats d’exportation militaires dans la région.

La France, impassible, semble épargnée par ce mouvement. « A ce jour, nous n’avons pas d’information sur le fait que la France aurait revu sa position sur les exportations d’armes », déplore Aymeric Elluin, chargé de plaidoyer « armes et justice internationale » pour Amnesty France. Aucune vente d’arme à l’étranger ne peut pourtant avoir lieu sans l’autorisation du gouvernement. La France est par ailleurs signataire d’un Traité sur le commerce des armes (TCA), et a adopté une Position commune de l’Union européenne (UE) sur les exportations de matériel militaire. Ces règlementation interdiraient a priori tout transfert d’armes vers les parties du conflit yéménite, compte tenu des graves violations du droit humanitaire qui y sont constatées.

Plus d’un milliard d’euros d’équipement pour les saoudiens

Pire : depuis le second semestre de l’année 2014, la France a accordé pas moins de 1989 licences d’exportation de matériel militaire aux différents pays engagés dans la coalition menée par Riyad ! Depuis 2007, l’Arabie Saoudite, le Qatar et l’Égypte sont les trois principaux clients de la France après l’Inde. Sur la seule année 2016, plus d’un milliard d’euros d’équipement militaire a été livré à l’Arabie Saoudite [1].

Dès lors, il n’est pas étonnant de retrouver des armes françaises sur le champ de bataille yéménite : des corvettes Baynunah du constructeur français CMN (Constructions mécaniques de Normandie) pour assurer le blocus, des canons Caesar pour pilonner le Yémen depuis sa frontière… Pour l’Observatoire des armements, la coalition profite ainsi d’un matériel français « dernier cri ».

L’exécutif français ne dit (presque) jamais non

C’est le Premier ministre après avis de la Commission interministérielle pour l’étude des exportations de matériels de guerre (CIEEMG), qui décide ou non d’autoriser les ventes d’armes à l’étranger. Avec des représentants des ministères de la Défense, de l’Économie et des Affaires étrangères, la CIEEMG est un organe purement exécutif : le Parlement ou la société civile en sont exclus.

De surcroît, son fonctionnement est opaque : il ne prévoit aucune transparence sur les motivations des décisions, ni sur leur conformité aux traités internationaux. Seul élément d’information officiel : le Rapport annuel sur les ventes d’armes du pays, transmis au Parlement. Il indique par exemple qu’en 2016, alors que Manuel Valls puis Bernard Cazeneuve occupaient Matignon, seules 48 demandes de licences d’exportation de matériel militaire ont été rejetées sur la base de la Position commune de l’UE. Tandis que 4454 licences étaient accordées. Soit un taux d’approbation de près de 99 %…

Des bénéfices pour les entreprises et les pays acheteurs

Pourquoi un tel enthousiasme des politiques à approuver des exportations d’armes vers d’autres pays, quels qu’ils soient ? Le système militaro-industriel français s’est construit sur la dépendance aux exportations : les entreprises d’armement ont besoin de vendre pour être rentables. Et elles peuvent compter sur l’État pour les soutenir.

Cette rentabilité est en effet largement subventionnée, que ce soit par des avances financières, des garanties publiques à l’exportation, ou l’emploi des fonctionnaires de la Direction générale de l’armement et des attachés de défense pour promouvoir les armes françaises à l’étranger. Sans compter l’engagement des ressources de l’armée française, amenée à participer aux salons d’armement, aux démonstrations de matériel, et à former les personnels étrangers : des dépenses qui s’élèvent à des dizaines de millions d’euros par an, pour booster les ventes des industriels.

Pour gagner des contrats, les fabricants d’armes concèdent des compensations ou « offsets » à l’État acheteur, c’est-à-dire des réinvestissements dans l’économie locale et des transferts de technologies. Dans le cas du contrat sur l’achat de Rafales, l’Inde a obtenu un niveau de compensation de 50 %, ce qui signifie que plus de 3 milliards d’euros seront investis dans l’économie indienne sur les 7,87 milliards du contrat. Une aubaine pour l’économie et les emplois… dans le pays acheteur. « Le contrat des sous marins en Australie va probablement créer plus d’emplois en Australie qu’en France », confirme Aymeric Elluin, d’Amnesty France.

La prolifération, « effet boomerang » de la stratégie française

Outre la délocalisation des emplois, les concessions octroyées aux pays clients, et notamment les transferts de technologies, leur permettent à terme de créer leur propre industrie militaire. Ainsi, grâce au savoir-faire acquis avec la production des hélicoptères d’Aérospatial (aujourd’hui Airbus) dans les années 80, la Chine fabrique désormais ses propres hélicoptères militaires, qu’elle exporte au Cambodge, au Pakistan, en Namibie ou encore en Zambie. En mai 2017, l’Arabie Saoudite annonçait la création de sa propre entreprise d’armements, la Saudi Arabian Military Industries (SAMI).

Les exportations d’armes de la France contribuent donc à la prolifération des capacités de production dans le monde, y compris chez des concurrents et peut-être même à destination d’adversaires potentiels ou d’États peu scrupuleux. Pas de quoi refroidir le gouvernement, qui continue à faire la promotion des industriels français de la Défense, du Qatar à la Turquie, sans faire beaucoup de cas de ses engagements en matière de droits humains. Le Yémen est sans doute loin d’être le seul terrain où des civils sont ou seront victimes des technologies françaises.

Un contrôle démocratique plus que jamais nécessaire

Certains écrits commencent à questionner cette stratégie de la course aux exportations. L’industrie de la défense française serait de plus en plus dépendante des exportations [2]. Par ricochet, le budget de l’État peut aussi être affecté. Ainsi, l’équilibre financier de la Loi de programmation militaire 2014-2019 était-il lié à la vente des Rafales de Dassault à l’étranger, puisqu’en cas d’échec, le gouvernement s’était engagé à couvrir les surcoûts de production de l’avionneur. Pour préserver les finances publiques, il faut vendre à tout prix. Y compris à l’Égypte, malgré la décision de l’Union européenne de suspendre les ventes d’armes au régime dictatorial du maréchal al-Sissi.

Pourtant, ces contrats qui se chiffrent en milliards d’euros restent largement présentées comme des succès commerciaux, et la France comme une « championne des exportations » qui « talonne la Russie ». « En France, il n’y a pas de culture de contestation ou de débat sur la question des exportations d’armes, comme en Grande Bretagne, en Allemagne ou en Belgique, relève Aymeric Elluin. C’est consubstantiel à la cinquième République. »

Alors qu’au Royaume-Uni, il existe une Commission parlementaire dédiée au contrôle des exportations d’armes, le débat en France se limite essentiellement à quelques questions écrites et un rapport annuel qui est transmis aux députés sans plus de discussions. « Il faudrait qu’il y ait des contre-rapports, des questions sur l’utilisation des armes à l’étranger, des garanties contre les violations des droits humains : c’est un enjeu pour les générations futures », conclut Aymeric Elluin. D’ici là, le Yémen attendra. »

Notes

[1] Source : Rapport aux parlementaires sur les ventes d’armes 2017.

[2] L’industrie de défense française était en 2012 dépendante des exportations à hauteur de 20% de son chiffre d’affaires. Récemment, le PDG de la Direction des constructions navales (aujourd’hui Naval group) indiquait que son entreprise était dépendante à 50 % des exportations. Voir Lucie Béraud-Sudreau, « La politique française de soutien aux exportations d’armement : raisons et limites d’un succès », Institut français des relations internationales, juin 2017.

« La sécurité pour les peuples… c’est une responsabilité. »

Liberté Hebdo du 8 au 15 février 2018

Liberté Hebdo logo

Ancien membre du comité exécutif et responsable des relations internationales du PCF de 2006 à 2013, Jacques Fath est l’auteur d’un essai sur la guerre, la sécurité internationale, la puissance et la paix. Il sera l’invité d’Espace Marx le 16 février à Hellemmes.

Les conflits d’aujourd’hui ne relèvent plus des mêmes aspects que ceux qui ont caractérisé le XXe siècle. Comment définir ces guerres ?

Il s’est produit une transformation de l’ordre international dès la fin des années 1980, avec trois facteurs déterminants : un basculement géopolitique avec l’effondrement de l’URSS et du Pacte de Varsovie, l’approfondissement de la crise du capitalisme mondialisé et la révolution numérique. La robotisation, l’ intelligence artificielle… jouent un rôle décisif dans l’élaboration des armes nouvelles.

Ces trois facteurs ont engendré une mutation de l’ordre international, notamment dans les formes et la nature des guerres. Les conflictualités actuelles ne procèdent donc plus du même contexte. Elles sont déterminées par la crise du capitalisme, par ses contradictions et ses fractures sociales, et par les rivalités de puissances.

Vous pensez à la Chine, l’Inde ?

Ces rivalités sont permanentes entre les États-Unis et la Chine, entre les États-Unis et la Russie… avec des formes d’alliances compliquées, notamment au Moyen-Orient. Chacun défend ses intérêts stratégiques. Ainsi la Turquie, pourtant membre de l’OTAN, se permet de tenir tête aux États-Unis…

Il faut être attentif à ce qui se passe avec la Chine, notamment au regard de ces « Nouvelles routes de la soie ». C’est une politique d’investissements et de rapprochements multiples, y compris avec la Russie… même si, là aussi, ce n’est pas sans contradictions. Il s’agit d’une formidable projection de puissance économique. Cela semblent préfigurer quelque chose comme une Eurasie sous domination chinoise. Les ambitions de Pékin dépassent d’ailleurs ce vaste horizon continental.

La Chine, pourtant, revendique une action de « soft power », sans engagement militaire…

Par son poids, sa puissance intrinsèque, le pays peut acquérir une hégémonie qui ne ressemble pas à la forme néo-impérialiste occidentale. Mais on constate, en mer de Chine méridionale, des tensions de souveraineté territoriale dans une zone conflictuelle avec des aspects militaires qui traduisent la montée d’une affirmation militaire chinoise.

Quant aux Nouvelles routes de la soie – stratégie essentiellement économique -, elle s’accompagne aussi de considérations sécuritaires : la Chine a fourni deux navires de guerre au Pakistan. Elle a installé une base militaire à Djibouti… Elle ne peut s’extraire des enjeux stratégiques, mais on ne peut pas considérer aujourd’hui que son attitude est équivalente à celle des États-Unis.

Pour lutter contre le terrorisme sur leur territoire, les puissances occidentales, dont la France, envoient des contingents militaires en Afrique, en Afghanistan… Pour quel résultat ?

La France intervient militairement, notamment dans la zone sahélo-saharienne, contre les groupes armés djihadistes et les réseaux criminels organisés, parce qu’elle est l’ancienne puissance coloniale. Elle a, et elle veut en garder les capacités du fait de ses intérêts propres. Certains disent qu’ il faut affronter le terrorisme là où il apparaît… Mais l’intervention française ne règle rien. Il y a surtout la volonté de protéger une zone d’influence et des intérêts cruciaux, notamment au Niger avec l’exploitation de l’uranium.

Mais il n’y a pas que la France et l’opération Bakhane. Il faut ajouter la Minusma (mission ONU) le G5 Sahel (les cinq États de la zone), l’ EUTM Mali (mission de formation UE) et l’armée malienne… soit entre 35 et 40 000 soldats en 2018. Cet agrégat de forces et de missions obtient quels résultats ?.. Le règlement politique est dans l’impasse, la zone sahélo-saharienne est plus déstabilisée que jamais, ce qui alimente les migrations forcées… et bloquées par les pays de l’UE ! C’est un échec majeur de la conception sécuritaire et militaire dominante.

Pourquoi les questions de défense ne donnent-elles pas lieu à plus de débat en France ?

Il y a très peu de débat public sur les questions de défense. La critique semble illégitime tellement l’emprise d’un esprit unilatéral de défense est forte. Alors qu’il n’y a pas de consensus national sur ces questions. Le pouvoir a mis le couvercle sur les enjeux du nucléaire militaire depuis des années, ce que confirme Emmanuel Macron. Ces questions méritent bien autre chose. Par exemple, faire rentrer la question de l’élimination des armes nucléaires dans le débat stratégique…et public. Avec l’adoption du Traité d’interdiction des armes nucléaires c’est le moins qu’on puisse faire…

Pas de paix sans justice sociale, disent des acteurs tels que le Mouvement de la paix. Est-ce votre point de vue ? Pourquoi ?

C’est décisif… Même des militaires l’affirment : l’intervention armée seule ne résout pas les problèmes. Mais ce ne sont que des discours. La réalité et la gravité des problèmes posés appellent une redéfinition des politiques de développement et de coopération.

Un exemple : L’Union européenne a définit en 1975 et en 1995 une politique de coopération avec les Pays d’Afrique, mais aussi avec l’ensemble des pays arabes. Qu’est-ce qu’on constate aujourd’hui ? Une crise majeure du développement, une extension du néolibéralisme dans les échanges avec le Sud, des effondrements politiques et sociaux, des États faillis, des conflits sans fin…

Il faut répondre à la question : comment on construit de la sécurité pour les peuples ? Par le développement dans toutes ses dimensions, par des coopérations d’intérêt mutuel, par le règlement politique multilatéral des conflits, par le désarmement… Il faut créer des contextes, des politiques communes, des solidarités qui soient des réponses positives aux urgences, aux attentes sociales… et qui ouvrent le chemin du développement dans la longue durée.

Au sein du comité exécutif du PCF, vous avez été en charge des relations internationales. Les actions en faveur de la paix existent partout et recouvrent des modalités différentes. Que retenez-vous de cette expérience ? Comment donner corps à ces actions ?

La solidarité internationale est porteuse d’espoir et de confiance. Là aussi, il faut construire aujourd’hui et dans la durée. Quelles coopérations pour quel développement et pour quel ordre international voulons-nous ? Nous vivons dans un monde interdépendant. Nourrir les convergences est une nécessité. Il faut aussi conduire ensemble des batailles politiques pour la sécurité des peuples, pour la paix et le désarmement. Dans le grave contexte actuel, ce n’est pas seulement une nécessité. C’est une responsabilité.

Propos recueillis par Mathieu HEBERT

—————————–

POUR ALLER PLUS LOIN

Rencontre-débat avec Jacques Fath : « De la mondialisation capitaliste en crise à la sécurité humaine pour tous ». Vendredi 16 février à 19 h. Espace Marx, 6 bis rue Roger Salengro, Hellemmes (métro Marbrerie).

Jacques Fath, Penser l’après… essai sur la guerre, la sécurité internationale, la puissance et la paix dans le nouvel état du monde, Arcane 17, 2015, 236 pages

Désarmement: le Secrétaire général de l’ONU pour une grande initiative

L’Agence Reuters a publié le 7 février cette information exclusive : le Secrétaire général de l’ONU, Antonio Guterres a l’intention de pousser à un vaste plan de désarmement, même si les États-Unis restent sceptiques.
Ce plan concernera tous les types d’armements du nucléaire et la cyber-défense aux armes légères, dans un défi aux résistances américaines devant de fortes initiatives de ce type.
Antonio Guterres pense rendre public cette initiative à Genève, à la fin de février, lorsque les Ministres des affaires étrangères seront présents pour le Conseil des Droits de l’Homme et pour la Conférence du désarmement, avant un vrai lancement en avril.
Ci-dessous le texte intégral de Reuters.

February 7, 2018 / Reuters Exclusive: U.N. chief plans major disarmament push but U.S. skeptical

Tom Miles

GENEVA (Reuters) – U.N. Secretary-General Antonio Guterres is to launch a major push for disarmament talks covering everything from nuclear and cyber war to small arms, braving certain U.S. resistance to such bold initiatives, officials and experts told Reuters

Guterres aims to forestall a new nuclear arms race and get the big powers back into negotiations after two decades of stalemate, according to a Geneva-based expert familiar with the plans, who requested anonymity.

The expert said Guterres also wants to end “state-led paralysis” in talks on cyberwarfare and robotics by getting the private sector involved, and to start talks on use of explosives in urban areas and curbing access to conventional weapons, the biggest killer.

Chances of success are uncertain at best. But with nuclear tensions rising, Guterres may be uniquely placed to oil the wheels of negotiations given a 2009 U.N. Security Council pledge to “create the conditions for a world without nuclear weapons”.

If Guterres is clever he can use that to say: ‘Okay what have you done in the past 10 years?’” said Marc Finaud, an expert at the Geneva Centre for Security Policy.

But a U.S. official, speaking on condition of anonymity, told Reuters that nuclear disarmament was an “aspirational goal” only, and it was hard to conceive of it in the near term.

We don’t believe that it’s time for bold initiatives, particularly in the area of nuclear weapons,” the official said, adding Guterres should also tread carefully in new technologies such as killer robots, known as “autonomous” weapons.

I worry that the Secretary-General may be trying to treat the symptoms and not the root causes of why countries arm and rearm.”

The U.S. Nuclear Posture Review, published on Friday, aims to improve deterrence, ensuring Russia, China, North Korea and Iran cannot mistake the U.S. willingness to defend itself, the official added.

The U.S. official said the problem was political will and the fact Russia – with whom tensions have risen over issues ranging from Russian involvement in Ukraine’s conflict to alleged Russian interference in the 2016 U.S. election campaign – was not a willing or trusted negotiating partner. “We have to let them (Russia) know that we are dealing with them from a position of strength. Over the last eight years there’s been a perception of weakness. We want to disabuse them of that notion.”

OUTSIDE THE BOX

Guterres’ strategy, to be spearheaded by his disarmament chief Izumi Nakamitsu, seeks to revive talks across the spectrum despite deepening U.S.-Russian mistrust and heightened tensions on the divided Korean peninsula.

The path to peace through disarmament does not lie waiting for the right security situation to materialize, while countries increase their military budgets and stockpiles year after year,” she said in a speech last October.

We should not shy away from bolder thinking.”

The U.S. official said the negotiating forum was “littered” with stalled initiatives aiming to think outside the box.

They include China and Russia’s thrust for a treaty on weapons in space and Russia’s hope for a treaty to stop Islamist militants obtaining weapons of mass destruction.

Nakamitsu is expected to invite key officials, including diplomats from the United Nations’ five veto-wielding powers, including Washington and Moscow, to a retreat near New York later this month for discussions.

Guterres hopes to unveil his initiative in Geneva at the end of February, when foreign ministers, including Sergei Lavrov of Russia, are expected at the U.N. Human Rights Council and the Conference on Disarmament, before a full launch in April.

Richard Lennane, head of the non-profit Geneva Disarmament Platform, said it was the right time for what appeared to be an unprecedented and ambitious move, and encouraging that Guterres was launching it early in his tenure.

The tensions between Donald Trump and the North Korean leader have frightened a lot of people, and for the first time in a long time people have realized that there’s an imminent prospect of a nuclear war starting. So I think that is fertile ground to try an initiative like this,” he said.